F É M I N I S T E S   C Y B E R S O L I D A I R E S 11-06-05 

Cybersolidaires
Version initiale de Colette Lelièvre parue dans le cahier spécial sur "L'Internet citoyen" de Recto Verso de septembre-octobre 2002, développée et maintenue à jour par Nicole Nepton.
Consultez également les articles classés sous le thème communication et TIC dans le site des Femmes de la francophonie.


WSIS Declaration para. 11a Des féministes se mobilisent pour que les femmes prennent leur place dans le monde de la communication et de l'information. En vue du Sommet mondial sur la société de l'information (SMSI) de 2003 et 2005, elles élaborent leur propre plate-forme de revendications sur le système mondial de la communication et de l'information. Entre temps, en mars 2003, se tenait la 47e session de la Commission sur le statut de la femme de l'ONU. À cette occasion, les pays ont révisé l'une des sections de la plate-forme d'action de Beijing : la section J sur les femmes et les médias. Celle-ci cible autant les gouvernements que les médias en général, les organisations non gouvernementales et les associations professionnelles. Ses objectifs sont de "permettre aux femmes de mieux s'exprimer et de mieux participer à la prise des décisions dans le cadre et par l'intermédiaire des médias et des nouvelles techniques de communication" et de "promouvoir une image équilibrée et non stéréotypée des femmes dans les médias". Depuis l'adoption de cette plate-forme lors de la 4e Conférence mondiale sur les femmes en 1995, ces objectifs ont-ils été atteints?

En juin 2000, à New York, le caucus femmes et médias de Beijing +5 avait souligné l'indigence du document des résultats à l'endroit de l'entreprise privée et des institutions publiques qui freinent l'accès des femmes aux communications. En effet, à l'encontre d'objectifs de développement social et humain, les accords internationaux - tels que la future ZLÉA - déterminent l'accès aux moyens de communication à des fins uniquement commerciales. Par ailleurs, globalement, les médias de masse continuent de présenter les femmes de manière extrêmement sélective et affaiblissante tout en les montrant moins souvent que les hommes en tant que sujets, expertes ou dirigeantes. La majorité d'entre alles y sont aussi tout simplement invisibles. Avec la concentration croissante de la propriété des moyens d'information et des médias aux mains de monopoles, on ne peut parler de progression du secteur des médias vers une communication citoyenne inclusive des intérêts des femmes et des hommes dans leur diversité, au contraire.




Un atout considérable

Les "nouvelles technologies" peuvent combler en partie ces carences, mais les femmes, et en particulier les plus pauvres et discriminées, ont peu accès à Internet. Quand c'est le cas, elles l'utilisent encore très peu pour diffuser leurs points de vue et pour mobiliser, bien qu'Internet en ait aidées à maintes reprises partout dans le monde. Par exemple, au Sénégal, le projet Parenté conjointe contribue à sensibiliser l'opinion publique sur la nécessité de remplacer dans la législation nationale les notions de "puissance maritale" et de "puissance paternelle" par celles de "parenté conjointe" et de "responsabilité conjointe de la famille". Selon Marie Hélène Mottin-Sylla, qui anime les sites famafrique et Parenté conjointe, il a permis d'alimenter le débat au point que les Sénégalaises, qui tentent de changer cette loi depuis 30 ans, sont pleines d'espoir d'y arriver bientôt et ce, malgré le fait que la population sénégalaise a beaucoup moins accès à Internet que les Québécois-es.

Zarmina Khwazak en train d'être exécutée par son beau-frère. Vidéo: RAWA En Colombie, l’ACIN (Asociación de Cabildos Indígenas del Norte del Cauca) utilise les communications par Internet comme antidote à la violence dont sont victimes les peuples autochtones. Des nouvelles et d’autres informations sont régulièrement téléchargées sur disquettes à partir d’Internet qu'on envoie ensuite par minibus à une station de radio autochtone. En combinant des services de radio publique et de télécentre, l’ACIN peut atteindre des communautés plus éloignées. "Ce que nous faisons sur Internet, c’est informer le monde de ce qui se passe ici, déclare Vilma Almendra. Nous réussissons à rejoindre des auditoires internationaux, ce qui nous était impossible avant l’ouverture du télécentre. À présent, nous communiquons avec les médias, avec des organismes donateurs et avec des organisations de défense des droits de la personne et de l’environnement. Avant, nous dépendions de conseillers et d’intermédiaires non autochtones parce que nous ne savions pas comment communiquer. Avec le télécentre, nous pouvons maintenant diffuser nous-même l’information qui concerne notre propre situation."

Exploitant déjà la radio pour diffuser des informations dans leurs communautés, des femmes du Brésil investissent aussi la toile afin de partager des informations avec des femmes d'autres régions et de mieux travailler en réseau. Un autre exemple : les féministes ont révélé la situation des femmes afghanes et fait connaître leurs mouvements de résistance en utilisant Internet afin d'informer la communauté internationale sur la situation dramatique des femmes et des filles de ce pays. Leurs courriels ont été relayés dans le monde entier, dont ceux de RAWA qui s'est aussi servi d'Internet pour diffuser des vidéos et des photos prises au risque de la vie de ses membres et pour recueillir des fonds afin de construire un hôpital et financer des écoles.


CHOIX, le magazine de décembre 2003 du Programme des Nations Unies pour le développement, offre bien d'autres exemples dont :
Lituanie : Trouver un emploi grâce aux TIC
Émirats arabes unis : Vers l'émancipation des femmes




Mais qu'il faudrait exploiter sans soutien

Mais des pays tels que le Canada investissent l'essentiel de leurs ressources collectives dans les infrastructures, le cybergouvernement ou le soutien des entreprises privées, ce qui ne laisse qu'une part extrêmement congrue au développement d'usages sociaux et citoyens d'Internet, comme si ceux-ci se constituaient d'eux-mêmes en branchant des ordinateurs avec le programme VolNet, aujourd'hui terminé, et en équipant des points d'accès communautaires tout en comptant sur le bénévolat. Pourtant, il faudrait agir aussi sur les résistances individuelles et sur celles des organismes eux-mêmes face aux bouleversements importants qu'amènent les nouvelles technologies. Explorer les possibilités qu'offre Internet, revoir son fonctionnement afin de pouvoir exploiter son potentiel sans grincer des dents, faire des apprentissages, créer et maintenir des ressources Internet, le tout dans un contexte d'équipements inadéquats et de ressources humaines pressées de toutes parts, cela ne va pas de soi, au contraire. Des innovations se font malgré tout, parce que les besoins sont considérables.

Particulièrement sous-équipés, les groupes de femmes ont un défi d'autant plus grand à relever. Une stratégie gagnante est de leur montrer concrètement l'utilité d'Internet tout en créant des ressources adaptées à leurs besoins et intérêts, ce qu'un site tel que celui des Cybersolidaires contribue à faire. En décembre 2003, chaque jour, 10.000 pages de notre site étaient téléchargées. Qu'est-ce que ce serait si nous recevions du financement pour soutenir la réalisation de notre mission? Les groupes communautaires ont besoin de ressources pour développer les outils Internet qui les soutiennent adéquatement. Ils ont aussi besoin d'avoir accès à des expertises pointues... qui se développent en dépit du bon sens puisqu'elles ne sont pour ainsi dire pas soutenues non plus. Pendant ce temps-là, le gouvernement canadien s'alloue les ressources dont il estime avoir besoin afin de se restructurer de sorte qu'il soit en mesure de profiter à fond du potentiel offert par les nouvelles technologies, tandis que l'Inforoute québécoise de l'information fait la part chiche aux usages sociaux et citoyens d'Internet. On ne développe pas des usages qu'ils soient commerciaux, éducatifs, culturels ou gouvernementaux d'Internet sans y investir des ressources, pourquoi les usages sociaux et citoyens des nouvelles technologies feraient-ils bande à part?




Au coeur des enjeux confrontant notre époque

Les changements dans les médias... sont "porteurs d' un potentiel énorme, autant positif que négatif, pour faire avancer ou bloquer l'avènement d'un ordre plus juste et équitable entre les genres". En fait, la mise en place de la société de l'information et de la communication est au coeur des enjeux politiques, économiques, culturels et sociaux auxquels nous sommes confrontées. Le sujet du Sommet sur la société de l'information (SMSI) n'est pas la technique mais l'avènement de la société mondialisée dans laquelle l'émancipation des humains, et particulièrement celle des filles et des femmes, est liée aux possibilités de communiquer et d'échanger des informations. Alors que le concept de société de l'information évoque la transmission unidirectionnelle d'informations se prêtant au contrôle centralisé, la lutte pour la démocratisation de la communication part plutôt de l'idée d'interactivité et de participation aux processus de communication.

Ce qui n'a rien pour plaire à une bonne partie des États de la planète dans le contexte post 11 septembre. Ainsi, alors que l'ONU annonçait qu'elle ouvrirait la porte à une participation sans précédent de la société civile à ce Sommet, selon Louise Lassonde, coordonnatrice du secrétariat exécutif du SMSI pour la société civile, des États souhaitent plutôt le contraire afin d'éviter qu'il se transforme en plate-forme de revendications en faveur des droits humains ou d'expression. Favoriser la participation des entreprises privées leur semble plus adéquat au point d'avoir proposé qu'elles soient accréditées sur une base individuelle plutôt que par le biais de leurs entités non commerciales, ce qui aurait été un dangereux précédent.

Il est aussi significatif que l'organisation du SMSI ait été confiée à l'Union internationale des télécommunications (UIT) plutôt qu'à l'UNESCO qui se consacre pourtant à la culture, à l'éducation et à la science. Au lieu d'aborder l'accès à la culture, à l'éducation et à la participation citoyenne, le SMSI coordonné par l'OIT tend à se concentrer plutôt sur la diffusion d'informations, les infrastructures et les équipements de même que sur les questions de "sécurité", tout en faisant une place marginale à la société civile.

La première phase du Sommet s'est terminée le 12 décembre 2003. Une déclaration de principes et un plan d'action ont été adoptés mais sans solidarité numérique concrète. Concernant la gouvernance de l'Internet, les chefs d'État réunis à Genève ont choisi de se donner le temps de la réflexion jusqu'à la deuxième session en 2005 à Tunis. La déclaration de la société civile, Définir des sociétés de l'information centrées sur les besoins des êtres humains, a été adoptée à l'unanimité lors de la plénière du 8 décembre. Elle inclut les apports des groupes de travail thématiques et régionaux réalisés au cours du processus préparatoire du SMSI. Accompagnée de la liste des signataires, elle a été présentée officiellement le 11 décembre au cours d'une conférence de presse. La société civile, le secteur privé, les gouvernements ainsi que les individus sont toujours invités à l'appuyer. Les appuis doivent être envoyés à ct-endorse@wsis-cs.org. Les signataires sont priés d'indiquer leur nom, pays et, le cas échéant, le nom de leur organisation et leur titre. Les noms des signataires sont publiés dans le Web.

Afin de faire en sorte que les préoccupations des femmes soient peut-être bien - un peu et à force - prises en compte, s'est formé le NGO Women's Gender Strategies Working Group. Les militant-es intéressés à participer au processus menant au Sommet de 2005 sont invitées à se joindre à s'abonner à la liste Ngowomen (les échanges se font principalement en anglais). On peut aussi travailler avec le Gender Caucus en s'abonnant à genderandict, une liste de discussion modérée qui informe - en anglais - sur les politiques internationales et les recherches en genre et TIC. Faites parvenir un courriel à majordomo@let.uu.nl avec, dans le corps du courriel : subscribe genderandict. Et appuyez les recommandations d'action du Gender Caucus : Faites des femmes des partenaires égales dans la société de l'information!. Il serait aussi pertinent de vous abonner à Femmes et poliTIC, un espace pour échanger en français sur ces enjeux et sur le potentiel offert par les TIC aux mouvements citoyens et féministes.



POUR EN SAVOIR PLUS

Sommet mondial sur la société de l'information Pour vous tenir à jour, consultez la Plate-forme des réseaux citoyens et ces couvertures en direct du SMSI 2003 : MédiaTerre - CMAQ - ENAWA - Daily Summit - Civil Society News Center.

Documents :




LE SOMMET MONDIAL SUR LA SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION

En décembre 2003 à Genève et à Tunis en 2005 a lieu le premier Sommet mondial sur la société de l'information. Le 12 décembre 2003, l'ONU adoptait une Déclaration de principes et un Plan d'action. Le 8 décembre, la société civile adoptait également une déclaration : Définir des sociétés de l'information centrées sur les besoins des êtres humains.

9 au 11 novembre 2005 - Bilbao, Espagne
2e Sommet mondial des villes et des pouvoirs locaux sur la société de l’information

16 au 18 novembre 2005 - Tunis
Sommet mondial sur la société de l'information

Consultez les blogues portant sur le Forum international sur le logiciel libre (Brésil, juin 2005), et sur les événements intitulés Paver la voie de Tunis (Winnipeg, mai 2005), Les enjeux de la 2e phase du SMSI et Le gouvernement québécois en ligne (Montréal, avril 2005).

Forum social mondial 2005
Le 5e FSM a adopté le droit de la communication, AMARC

Déclaration de la Campagne CRIS à l'Assemblée des mouvements sociaux

Démocratiser la communication et les médias : les médias communautaires et la lutte pour la citoyenneté, Sony Estéus

Le libre, le politique et le social, Martine Paulet

Journaliste, un métier à risque, Martine Paulet

Des alliances pour plus d'indépendance, Martine Paulet


Réseaux
WSIS Civil Society Meeting Point
Civil Society and the WSIS
Plate-forme des réseaux citoyens
Choike: A Portal on Southern Civil Societies
NGO Gender Strategies Working Group
Gender Caucus
Réseau genre et TIC (Sénégal)
Outil de collaboration virtuelle internationale des peuples autochtones
Youth @ the WSIS
Caucus Droits humains
La Francophonie au Sommet
Le Canada au Sommet
Internet C2C dialogue CàC

UNIFEM
ITU : Gender and WSIS et Secrétariat exécutif
WSIS-online.net
UNESCO

Fonds de solidarité numérique : Le Fonds doit faire ses preuves

ABONNEZ-VOUS

La liste de discussion Femmes et poliTIC est un espace pour échanger en français sur les enjeux femmes et TIC et sur le potentiel offert par les TIC aux mouvements citoyens et féministes. Si vous comprenez l'anglais, nous vous recommandons également la liste Ngowomen du WSIS NGO Women's Gender Strategies group. À noter que le processus du Sommet mondial sur la société de l'information se poursuit jusqu'en 2005.

Page reliée : Répertoire des listes de discussion et de bulletins de la société civile relatifs au SMSI



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FEMMES. MÉDIAS ET TIC

Femmes et médias: progrès et problèmes
Une vue générale réalisée par Carolina Rodriguez Bello pour WHRnet et incluant des informations de base sur les mécanismes internationaux des droits humains, des faits, des chiffres et des ressources.


TIC, genre : même combat!
La bataille à mener pour faire entrer les politiques "genre et TIC" dans les forums sociaux et autres lieux progressistes n'est pas simple. Ces espaces s'avèrent ignorants ou méprisants du genre. Quant aux lieux où se discutent les stratégies de démocratisation des TIC, ils sont totalement masculins. Pour leur part, les mouvements de femmes ne s'intéressent guère aux TIC comme outils de renforcement stratégique de leurs luttes. C'est plutôt une stratégie de mise en oeuvre d'une véritable communication populaire qu'il faudrait développer, selon Joëlle Palmieri (juillet 2004).


Les femmes et les TIC
Une fiche d'information de Condition féminine Canada.



Womenspace Le site de Womenspace traite des changements amenés par les TIC du point de vue de l'égalité des femmes. Une section Politiques donne accès à des rapports de recherche, à des analyses sur le cybergouvernement ainsi qu’à une trousse pour soutenir l’élaboration de politiques publiques. Des feuillets d'information résument une grande partie des enjeux auxquels les femmes sont confrontées, allant du cybercrime jusqu’à leur invisibilité dans le site du gouvernement du Canada.

Voir aussi : Strategies of Inclusion of Gender in the Information Society


Évaluation parallèle de l'application de la section Femmes et médias
La section J du Programme d'action de Beijing traite des questions à considérer sur le sujet Femmes et médias, d'objectifs et de mesures à prendre pour répondre aux préoccupations des femmes. 5 ans plus tard, ce rapport passe en revue les "efforts" des gouvernements pour mettre en oeuvre ces recommandations. Il aborde également de nouvelles préoccupations, les défis et obstacles que présentent les TIC et dégage des stratégies.


Entrevue avec Lenka Simerska et Malin Bjork pendant Beijing +5
FEMMES ET MÉDIAS à travers le monde pour le changement social fait le point sur la démocratisation de l'information du point de vue des femmes. Il offre aussi un tour du monde de leurs réalisations dans le domaine des médias.




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DES RÉSEAUX CLEF

La vérité d’une information dépend de plus en plus du fait que plusieurs médias importants la répètent et disent qu’elle est véridique bien qu’elle soit fausse. Dans ce contexte, le travail en vue de la démocratisation de l´information se focalise sur la production et la diffusion de contre-informations par la société civile. Pour ce faire, celle-ci doit nécessairement s'organiser en réseaux et exploiter Internet tout en développant des façons de rejoindre les personnes qui n'y ont pas accès

La campagne CRIS
Au Forum social mondial 2002 était lancée une campagne visant à informer la société civile sur l'importance de construire une société de l'information basée sur la transparence, la diversité, la participation et la justice économique tout en mobilisant sa participation au Sommet mondial sur la société de l'information.

La Plate-forme québécoise de l'Internet citoyen
Au Québec, Communautique a lancé une campagne d'adhésion à la Plate-forme de l'Internet citoyen. Citoyen-nes, organismes et regroupements préoccupés par la fracture numérique, la démocratisation et l'appropriation des technologies de l'information et de la communication sont invités à l'appuyer en ligne et à la diffuser.




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