par Brigitte Verdière
J'en ai marre, mais marre, marre, marre. Et c'est une façon gentille, légère et superficielle d'exprimer
la rage, la colère, la fureur qui me saisissent quand je lis certaines nouvelles dans les journaux.
Ces nouvelles, ce sont le rappel de la condamnation à mort pour adultère de la Nigériane
Amina Lawal. Au Soudan, Human Rights
Wtach dénonce également des condamnations à mort par lapidation de femmes pour adultère.
C'est la mort d'une quinzaine de fillettes d'Arabie Saoudite qui ont brûlé dans l'incendie
de leur école le 11 mars 2002. Selon plusieurs journaux, "les jeunes filles auraient été empêchées
de sortir de l'école par les Mutawaa, la police religieuse saoudienne... parce qu'elles n'avaient
pas eu le temps de se couvrir du voile noir réglementaire en public", révèle
Actualité des Religions dans son numéro de mai 2002. Amnistie internationale enquête
sur la question.
Au Libéria, les forces de sécurité utilisent le fouet et le bâton pour disperser les professeur-es et
étudiant-es qui manifestent pacifiquement et elles violent les étudiantes arrêtées à répétition. L'information,
divulguée par Amnistie internationale Belgique, date de 2001, mais ce genre de nouvelles revient régulièrement.
Bien sûr, à consulter ce type de sites, je trouverai toujours de quoi alimenter ma
colère. Que
je fasse un tour dans le domaine syndical, du travail, de la santé ou de l'éducation, je trouve de
l'eau à mon moulin.
Exemple : dans les zones franches du monde entier, les conditions de travail s'apparentent à de
l'esclavage. Je vous en reparlerai plus longuement un jour,
il y a trop à dire sur le sujet pour l'aborder rapidement. Cet esclavage existe aussi chez nous, à nos portes. Si vous en doutez,
intéressez-vous cinq minutes au sort de nombreuses jeunes femmes des Philippines, du Maroc...
qui travaillent comme aides familiales dans des familles du monde industrialisé à des conditions innommables.
Et que dire de l'égoïsme des pays développés qui dispensent au compte-gouttes
leur aide aux pays les plus pauvres tout en leur dictant des modèles de développement. Bien sûr, le but ultime est
le contrôle du commerce, mais aussi le contrôle des idées.
Ainsi le 22 juillet 2002, les États-Unis annonçaient qu'ils ne contribueraient pas au
financement du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) cette année - une perte de 34 millions US$, soit 12.5% du budget annuel du Fonds -
sur la base que ce dernier encouragerait la politique de planning familial coercitive de la Chine. Bizarre
comme tout d'un coup, ils souhaiteraient voir la population de la Chine augmenter. Ce qui arrivera
de toute façon, car le gouvernement chinois est en train de lever peu à peu le principe de l'enfant
unique qui s'impose encore dans de nombreuses provinces du pays. Des parlementaires britanniques,
pas tous ennemis des États-Unis, ont effectué une tournée
en Chine en avril 2002 et en sont revenus convaincus que le FNUAP y faisait du bon boulot.
Selon le FNUAP, cette perte de 34 millions $US
empêchera de mener à bien une politique qui permet d'éviter quelque 2 millions de grossesses non
désirées dans le monde, 800.000 avortements et plus de 77.000 décès. Pour sa part, le FNUAP estime
que "tout manque à gagner d'un million de dollars US au titre de l'appui à l'achat de contraceptifs
entraîne 360.000 grossesses non désirées, 150.000 avortements provoqués, 800 cas de décès liés à
la maternité, 11.000 décès de nourrissons, 14.000 décès d'enfants de moins de 5 ans."
Cette décision étatsunienne est un pas de plus dans la croisade
que mènent, avec succès, les groupes anti-choix de ce pays. En effet, le FNUAP agit en distribuant
des préservatifs, en aidant à mettre sur pied des centres de santé génésique sûrs, en collaboration
avec les centres de planning familial et les programmes de santé mis sur pied par les gouvernements.
La mesure s'ajoute aux effets de la Global Gag Rule (règle du bâillon mondial),
imposée en janvier 2001 par la nouvelle administration Bush. De nombreuses ONG
étrangères sont déjà privées
des fonds US du planning familial sous prétexte qu'elles fournissent de l'aide à l'avortement ou
simplement parce qu'elles mènent campagne pour obtenir une réforme de la loi qui réglemente
l'avortement dans leur pays.
Le Center for Reproductive Rights (CRLP),
une organisation étatsunienne sans but lucratif qui promeut le droit des femmes à contrôler leur santé
sexuelle et génésique, tente de convaincre les tribunaux étatsuniens qu'il y a là atteinte à la liberté
d'expression. Le Centre cite le cas d'ONG péruviennes, sénégalaises, boliviennes privées de moyens d'action
à cause de la Global Gag Rule. Ainsi, en Bolivie, où 390 femmes sur 100.000 meurent de complications
à la grossesse, quatre organisations se sont retirées d'une campagne menée en faveur d'une modification
de la loi sur l'avortement. La Global Gag Rule limite aussi l'efficacité des programmes d'aide
d'autres pays donateurs. Par exemple, l'Union
Européenne ne peut plus travailler avec des ONG étrangères financées
par USAID quand des projets visent à
réduire le nombre de femmes mourant des suites d'avortements non sécuritaires.
Quant à ce que signifie la nouvelle politique d'aide à l'Afrique, je vous renvoie à l'excellent
dossier sur le G8* publié par nos soins dans Internet.
Une chose est sûre : les femmes n'y gagnent rien. La démocratie,
le développement d'une citoyenneté responsable et épanouie non plus.
Et il faudrait rester calme?
* Ce dossier sera bientôt de nouveau en ligne.